Vivre près d’une centrale nucléaire favoriserait la leucémie chez l’enfant

Selon une équipe française, les cas de leucémies seraient deux fois plus fréquents chez les enfants qui vivent à proximité d’une centrale nucléaire. Mais cette nouvelle étude ne permet cependant pas de tirer des conclusions définitives sur un éventuel sur-risque de cancer.

Selon une étude française, le risque de leucémie à proximité des centrales serait deux fois plus fréquent.

Un excès de risque mais pas de conclusions…
Après

l’étude allemande de 2007 qui avait elle aussi identifié un excès de

leucémies chez les moins de 5 ans autour des centrales

nucléaires, c’est la deuxième étude d’ampleur à pointer du doigt ces installations. Dans le détail, l’étude française menée par l’INSERM a analysé le risque de leucémie à proximité des 19 centrales de production d’électricité françaises en s’intéressant particulièrement à la distance du lieu de résidence par rapport au site et à la distribution des doses dues aux rejets radioactifs gazeux des sites nucléaires dans l’environnement.
Cette nouvelle étude met en évidence un excès de leucémies infantiles dans un rayon de 5 km autour des centrales nucléaires françaises sur la période 2002-2007 (un sur-risque constaté sur une tranche d’âge 0 à 14 ans, plus large que l’étude allemande). Des résultats que les auteurs appellent à considérer avec prudence pour plusieurs raisons :

  • Le nombre de cas de leucémie reste faible (14 constatés contre 7,4 attendus selon la moyenne nationale) avec une incidence nationale qui reste stable (de l’ordre de 500 cas par an) ;
  • Le lieu du domicile des enfants au moment du diagnostic de la maladie et l’histoire de chacun (exposition in utero…) ne sont pas connus ;
  • Une étude antérieure réalisée sur la période 1990/2001 n’avait pas montré de tel excès ;
  • La recherche d’un lien statistique entre la fréquence des cas et l’exposition de la population aux rejets radioactifs réels dans l’atmosphère autour des centrales nucléaires ne fait pas non plus apparaître d’excès. Une fausse surprise si l’on considère que cette exposition est jugée de l’ordre de 1 000 fois inférieure à celle qui résulte de la radioactivité naturelle mais une donnée qui va à l’encontre d’un possible lien entre ces rejets et le risque de leucémies.

Pour l’IRSN (qui a participé à l’étude), ces résultats n’auront donc “pas de conséquences opérationnelles (…) en termes de gestion de risque pour les populations riveraines des sites nucléaires“.Nécessité de poursuivre des investigations scientifiquesL’IRSN ne balaie cependant pas d’un revers de main cette nouvelle étude et juge que “ce signal statistique, qui rejoint d’autres de nature comparable établis par le passé et dans d’autres pays“ ne doit pas être ignoré. De nouvelles investigations sont donc proposées, parmi lesquelles la tenue d’un séminaire international entre l’IRSN et l’Office fédéral de radioprotection allemand en vue de pouvoir mettre en commun les connaissances et les méthodologies de chacun. Le but est ainsi de pouvoir conduire des études internationales statistiquement plus puissantes et de mieux coordonner la recherche sur les facteurs explicatifs des leucémies infantiles. De la même façon, la plateforme de recherche européenne MELODI doit améliorer les connaissances sur les effets sanitaires des faibles doses de rayonnements ionisants.En d’autres termes, la ou les cause(s) des leucémies infantiles restent en partie mystérieuses. Quelle est la part causale des expositions aux radiations ionisantes à faible doses (d’origine naturelle comme le radon ou les expositions médicales), des expositions aux radiations non ionisantes (comme les lignes à haute tension), des facteurs infectieux, de l’exposition aux

pesticides ou aux hydrocarbures, de la proximité d’installations industrielles (non nucléaires), des afflux de populations pouvant bouleverser l’équilibre immunitaire d’une population…?Compte-tenu de ces nombreuses inconnues, il serait utile de mettre rapidement en place un suivi épidémiologique autour des centrales nucléaires,

comme le demande Corinne Lepage, ancienne ministre de l’environnement et candidature à la future élection présidentielle.David Bême
Sources :
Note d’analyse Publication scientifique conjointe Inserm et IRSN concernant les leucémies chez l’enfant autour des centrales nucléaires françaises sur le site internet de la revue « International Journal of Cancer » le 4 Janvier 2012 – IRSN (

accessible en ligne)Childhood leukemia around French nuclear power plants – the Geocap study, 2002-2007 -International Journal of Cancer -(

étude accessible en ligne)Photo : Inserm/FK